X - L'après-guerre > Conrad expose aux Pays-Bas
Le "Tour des capitales", comme on appelait aussi l'exposition
néerlandaise de 1949, connut une étape supplémentaire au Musée
municipal Van Abbe d’Eindhoven, au début de l’année 1950. Le directeur
de ce musée espérait bien que les quatre œuvres de Kickert qui avaient
voyagé en Europe du Nord, y seraient montrées. S’agissant d’une
présentation non prévue à l’origine, il demanda à Conrad son accord,
que celui-ci refusa. M. de Wilde revint à la charge le 11 novembre 1949
avec une insistance courtoise. Kickert se renferma dans sa position,
puis finit par changer d’avis et par répondre favorablement à cette
demande le 15 janvier. Or l’exposition avait été inaugurée la veille,
sans faire de place à ses œuvres donc. On pourrait résumer l'attitude
de Kickert : un peu de caprice, beaucoup de gâchis !
Du 21 au 30 mars, une exposition intitulée "La France vue par des
peintres contemporains" se tint dans le cadre du gala annuel de la
ville d’Utrecht. Les tableaux exposés, prêtés par la SNCF, leur
propriétaire, étaient les originaux qui avaient été reproduits en
affiches dédiées chacune à une province de France. L’Auvergne y
figurait dans la traduction romantique qu’en avait donnée Conrad à la
fin de 1947 (1).
De nouveau aux Pays-Bas, à La Haye cette fois-ci, quinze œuvres de
Kickert furent présentées du 22 avril au 13 mai dans la galerie
Bennewitz : des natures mortes et des paysages récents
(Villefranche-sur-Mer, Moriond, Auvergne). La critique souligna qu’il
s’agissait d’une redécouverte de Kickert qui n’avait rien exposé aux
Pays-Bas depuis 1936. Les articles publiés (2)
rappelèrent la place du peintre à partir de 1910, pour l’information
des nouvelles générations, et jugèrent favorablement ses œuvres. Hélas
cette exposition particulière fut la dernière avant sa mort, non
seulement aux Pays-Bas, mais en quelque lieu que ce soit.
Conrad gardait sa fidélité au salon d'Automne et on put l’y retrouver
les dix années suivantes. Cette fois il avait envoyé deux œuvres de
bonne taille (3), comme il
convenait dans un salon. Dans la première, un artiste, pour placer ou
déplacer un modèle nu, lui manœuvre la cuisse avec sa main, un geste
que Kickert ne se serait jamais permis avec ses modèles qui prenaient
la pose sur ses indications orales ou, exceptionnellement, guidés par
le manche de sa brosse. La familiarité montrée ici par le peintre
pouvait rendre son geste équivoque, ce que Conrad a voulu excuser en
intitulant l’œuvre "Homo Sum". D’autant plus que le peintre représenté est un homme encore bien jeune et le modèle, superbe, celui d’"Eve de Montparnasse". Dans la seconde œuvre, une mer houleuse se fracasse sur des rochers.
Kickert avait passé la première quinzaine de juillet à Loguivy au nord
de Paimpol, près de l’énorme embouchure du Trieux et face à l’île
Bréhat. Il y avait été invité par le Docteur et Madame Yves Bouguen (4)
qui partageaient ce magnifique endroit avec d’autres propriétaires
privilégiés. Conrad y fut si agréablement accueilli, qu’il y revint
chaque année jusqu’en 1958 (5).
Dire qu’il y travailla exprimerait mal l’intérêt qu’il porta à la mer,
à la côte, au fleuve et à leurs environs (Pleubian, Plougrescant). Il y
peignit au long de cette période cinquante et une œuvres et, de plus,
trois portraits.
(1) : Cf. supra, année 1947, p. 461-462.
(2) : Entre autres celui de
W. Jos de Gruyter in de Nieuwe Courant et celui de Kasper Niehaus,
illustré par une reproduction de "l’Autoportrait sur fond des monts
d’Auvergne".
(3) : "Homo sum" 1949 (145 x 115 cm) Opus 49-20 ;
"Villefranche" 1946 (115 x 145 cm) Opus A.46-34.
(4) : Il était aussi sénateur, ou ancien sénateur.
(5) : A l’exception des années 1952 et 1957.