I - Conrad critique d'art  > L'enfance de Conrad Kickert

Celle de son arrière-petit-neveu, Cornelis, Johannes, le père de notre Conrad, fut plus paisible. D’abord attaché au corps des grenadiers et chasseurs, il fut nommé comme major au commandement de la garde royale. La vie de son fils aîné, le jeune Conrad, s’en trouva quelquefois "affectée", car il était de temps à autre désigné pour partager les jeux de la princesse héritière Wilhelmine. Il garda d’elle le souvenir d’une fillette peu enjouée, dont le souci principal était de défendre la propriété de son seau et de sa pelle à sable. Désagréments faciles à supporter. En revanche, quelques années plus tard, très exactement le 27 février 1890, à l’âge de sept ans, l’univers de Conrad fut bouleversé car il perdit sa mère, emportée par la tuberculose. Après quatre ans de veuvage, le major se remaria. Conrad avait onze ans, Nicolas son frère cadet, huit.

Les études de Conrad Kickert, au lycée d’Haarlem et au gymnasium de La Haye, furent essentiellement littéraires. A noter qu’aux Pays-Bas l’enseignement ne se limite pas aux auteurs néerlandais : en même temps que trois langues étrangères, l’allemand, l’anglais et le français, les élèves sont appelés à en découvrir les principaux auteurs. Par goût, Conrad se familiarisera avec l’œuvre des plus grands... et celle de beaucoup d’autres. Bien sûr, c’est en néerlandais qu’il se risqua à écrire quelques poèmes, en adolescent doué, une voie dans laquelle l’encouragea un de ses maîtres, professeur d’anglais, Arthur van Schendel, lui-même poète. Mais le poète Willem Kloos que Conrad admirait, consulté à deux reprises, en 1902 et en 1905, ne jugea pas son travail comme la marque d’une vocation assez prometteuse. Conrad, après avoir obtenu facilement le diplôme néerlandais qui correspondait à notre baccalauréat de l’époque, s’offrit deux années pour approfondir sa culture tout en pratiquant les sports nautiques.

Dans la société assez fermée qui était la sienne, Conrad se distinguait par son ouverture d’esprit, sa soif d’apprendre et de comprendre. Son père n’appréciait pas de telles dispositions, si bien que Conrad se détacha de ce milieu étouffant. Il fut accueilli et, pour ainsi dire, adopté par les parents d’un camarade de gymnasium, le ménage Eekhout van Vollenhoven. Il rencontra fortuitement en 1903, dans une librairie-papeterie, un garçon de son âge, Jac Snoek, étudiant aux Beaux-Arts, qui se destinait à la peinture et en parlait d’une façon démonstrative. Cela incita Conrad à lui rendre visite pour voir en quoi consistait cette vocation. Il n’entretint plus de rapports ensuite avec Snoek, mais s’était procuré sans délai les instruments et fournitures nécessaires à un peintre. Dès lors, il regarda les choses autour de lui avec l’intention de les reproduire avec des couleurs. En même temps, son esprit le portant en permanence à la réflexion, à l’analyse, voire à l’introspection, il chercha à découvrir les messages ou les secrets que portait la peinture telle qu’on pouvait la voir, en reproduction ou en vraie grandeur. A partir de là, son cerveau, son œil et sa main s’attachèrent à cet art. Il en devina les possibilités prodigieuses et ressentit à quel point la personnalité profonde de l’artiste – son esprit et son âme – y était mobilisée et de ce fait s’y révélait. C’est pourquoi, à partir de 1904 et pendant des années, il mena de front la réflexion et l’action, à savoir la critique d’art et la peinture.

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Association Conrad Kickert
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